Thomas Angeli : « J’ai appris sur la vie »

Thomas Angeli, jeune coureur espoir du Team Asics Trail vient de vivre une expérience originale, un séjour de plus de 2 mois au Kenya, à partager le quotidien des mythiques coureurs des Hauts-plateaux.

Thomas, comment est né ce projet ?
Je me suis lié d’amitié en France avec un coureur Kenyan Philemon Kosgei qui fait de long séjours en Europe et à son contact je me suis passionné pour le mode de vie de coureurs de son pays. Devant mon enthousiasme, il m’a proposé de l’accompagner lors de son dernier stage d’entraînement. Je n’ai pas hésité un instant, c’était un rêve pour moi que de découvrir des modes d’entraînements différents des nôtres, mais aussi une autre culture.
Donc, au lendemain du stage du Team, le 04 février, ce fut le départ pour une aventure inoubliable, un voyage unique de 50 jours au côté des meilleurs athlètes Kenyans à Nyahururu sur les hauts plateaux en altitude (2400m) à quelques heures de Nairobi.

Quelle était tes motivations pour un si long voyage ?
Je souhaitais venir principalement pour l’entraînement et améliorer mes qualités de vitesse qui d’après moi sont très importantes en trail running. J’avais déjà entendu parlé de ces fameux camps d’entraînements où les plus grands champions de marathons, semi, 10km et autres distances viennent s’entraîner et se perfectionner avant les grosses échéances de leur saisons.

 

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Comment s’est organisé ton séjour ?
Philemon Kosgei mon ami m’a hébergé en compagnie de sa famille. Il m’a récupéré à l’aéroport de Nairobi pour m’accompagner jusqu’à chez lui à Nyahururu où il s’entraîne. On a vécu sans sa petite maison, composée de deux 2 pièces avec 4 lits, dont une petite cuisine avec un évier et un réchaud à gaz. Pour la douche c’est à la bassine et le linge à la main ! C’était rustique mais bien suffisant !

Comment l’entraînement s’organise sur place ?
La première semaine a été plutôt tranquille, juste des footings et sorties longues le temps de s’adapter à l’altitude et reconnaître un peu les lieux, la « fameuse » piste d’athlétisme, qui est en terre battue, le site pour le fartleck, les côtes dans les collines… bref pas d’excitation pour le début, mais ça n’a pas duré bien longtemps.
La deuxième semaine nous avons commencé les premières séances de vitesse, et c’est dur, très dur de courir vite à cette altitude et avec des athlètes hors-normes. Nous nous entraînions, deux à trois fois par jour. Le matin à 6h, c’est le footing matinal de mise en jambe qui dure entre 40min et 1h, puis c’est la séance d’intensité à 9h, soit la piste, soit le fartleck ou les côtes dans les collines. A 16h30, c’est le footing de récupération entre 40min et 1h. Le samedi c’est une sortie longue de 2h30 à 3h dans les montagnes et le dimanche repos. C’est le seul jour de la semaine où l’on ne court pas.
Au final, cela donne des semaines entre 130 et 150km et 15h à 20h de course à pied. Mais ce n’est pas tellement tous ces kilomètres qui sont difficiles, mais c’est plutôt l’enchainement des séances de vitesse et de qualité qui est compliqué. A cela s’ajoute le manque d’oxygène.
Mais en fait, au bout de deux semaines, mon corps s’est adapté à l’altitude et je me sentais plutôt bien. J’ai la chance en France de vivre à 1500 mètres d’altitude pendant un bon bout de l’année, je pense que ça m’a fortement aidé à réduire la durée d’acclimatation. Mais ce n’est tout de même pas évident de suivre les groupes qui courent incroyablement vite !

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Tu as vu des choses nouvelles, qui t’ont surpris ?
Il n’y a pas de secret ici. Il faut s’entraîner dur pour être capable de courir vite et longtemps, c’est tout. Tu chausses tes baskets le matin, tu les enlèves le soir et puis tu recommences ! Je dirais presque que tu pourrais dormir avec ! Et ce qui est bien c’est qu’une fois la séance terminée, nous avions beaucoup de temps pour se reposer, récupérer, boire et bien manger afin de recharger les batteries pour repartir en forme et surtout sans grosse fatigue. La récupération fait vraiment partie de l’entraînement chez eux, je pense que nous avons un rythme de vie en Europe un peu speed et qu’on néglige la récupération .
Ce qui m’a impressionné chez ces athlètes, c’est la motivation et la rigueur dont ils font preuve pour aller courir tous les jours de l’année, alors qu’ils n’ont presque pas un sous pour vivre. C’est une sacré leçon de vie qui m’a fait énormément réfléchir. Des personnes humbles et méritantes qui vivent à 200% chaque jour et portent en eux l’amour, la passion du sport et de la vie.

Et le mode de vie à la Kenyane ?
Les gens sont assez pauvres et vivent avec peu. C’est difficile d’avoir un travail qui rapporte suffisamment pour se payer une petite maison, plus encore une voiture et pouvoir nourrir sa famille. La plupart des gens travaillent dans les champs et font avec les moyens du bord, soit ils trouvent de petits jobs qui ne rapportent presque rien aux bords des route ou dans les villes sur les marchés. Ainsi, Débora, la femme de Philemon, gagne 50euros par mois et travaille tous les jours du matin au soir… Et quand elle rentre le soir elle prépare à manger, lave le linge et nettoie la maison ! Ceux qui ont la chance d’avoir un peu de talent comme coureurs sont athlètes et partent à travers le monde pour gagner de l’argent sur les courses. Mais ce qui m’a marqué c’est que les gens sont heureux avec quasiment rien pour vivre et ils se contentent de ce qu’ils ont. Une paire de chaussure, un short et un tee-shirt !

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Ton bilan sur cette expérience ?
Courir au soleil, à côté des éléphants, des singes, des girafes à travers les grands champs de blés et de maïs qui recouvrent une grande partie des collines alentours était tout simplement extraordinaire. Pour moi, c’est le sport qui te rapproche le plus proche de la nature, car tu es libre de ton chemin, libre de fouler les endroits qui t’attirent. Partager ces moments avec des amis et se contenter d’une forme de dénuement a été une expérience de vie forte et incroyable. Je n’oublierais pas ce voyage qui m’a beaucoup appris sur la vie, cette façon d’en vouloir, de se battre et de s’entraîner pour profiter pleinement de sa vie.
Et bien sûr, j’espère que toutes ces heures d’entraînements vont me servir pour ma préparation cette année et les années suivantes, mais ce n’est au final pas le plus important. Je retournerai au Kenya , c’est certain !

mars, 2024

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