Traileuse de haut niveau et maternité, c’est possible.

Sport de haut niveau et maternité

En février dernier, le Ministère chargé des sports a présenté au sein de l’INSEP, un guide intitulé « Sport de haut niveau et maternité, c’est possible » suivi d’une conférence avec des sportives de haut niveau, d’acteurs du monde du sport, de la présidente du Comité National Olympique et Sportif (CNOSF) Brigitte Henriques et d’experts et de professionnels de santé.  C’est un nouveau tournant dans le sport féminin de haut-niveau.

Une enquête « Sport de Haut Niveau et Maternité » menée par un groupe de travail associé au Ministère chargé des sports a révélé que près de 2/3 des sportives considéraient qu’il était difficile de mêler la carrière de haut-niveau à celle de maman. Nous avons donc voulu savoir de ce qu’il en était dans le trail, en demandant à Marie Dohin (5e de la TDS en 2021), et à Fiona Porte (victorieuse de la 6000D en 2011).

Marie Dohin, attend son 2e bébé, preuve que combiner les deux est bien possible. Que ce soit pour le premier (qui a un peu plus de 2 ans) ou le deuxième, les 2 grossesses n’ont pas été pensées en fonction du calendrier de course « Dans mon calendrier je voulais faire les France de Trail à Méribel en 2019 comme ils étaient à la maison pour après avoir un projet de grossesse, mais j’ai su que j’étais enceinte au moment de la Tranvulcania (ndlr : mai 2019) donc finalement, le projet de grossesse a eu raison de moi plus tôt et c’est elle qui a dictée son calendrier ». Pour sa grossesse actuelle, bien que le projet était de l’avoir après la TDS, rien n’était calculé car « tu ne sais jamais, en tant que femme, si les choses vont se faire rapidement, ou pas, facilement, ou pas » comme elle nous l’a expliqué ».

Marie Dohin, sport et maternité
Marie Dohin, sport et maternité

Bien que ses deux grossesses soient différentes avec une première sur la période estivale (printemps-été-automne) et cette seconde qui est plus hivernale (automne-hiver-printemps), sa première grossesse lui a été d’un grand apprentissage et nous a confié :  : « je ne savais pas si je pouvais continuer la pratique sportive, et la sage-femme que j’avais en suivi avait émis des réserves quant à la pratique, j’avais tout de suite arrêté le trail pendant 2 à 3 semaines et je n’avais fait que du home-trainer. Mais en me renseignant un petit peu plus, j’ai su qu’il n’y avait aucun souci à continuer la course à pied, alors j’ai repris ».

Pour cette seconde grosses la course à pied reste son activité principale, mais elle pratique le ski de fond et le ski de randonnée en parallèle « dans des proportions raisonnables » en prenant garde au risque de chute, notamment à cause des autres skieurs : « Ce que je fais, c’est que je continue les montées en ski de randonnée, et je redescends en télécabine ».

Pour Fiona Porte, le contexte est différent puisqu’elle ne faisait plus de compétition depuis 4 ans, lorsque le projet de grossesse a été établi. En revanche, elle nous a expliqué que « le fait de devenir maman m’a motivée à reprendre la compétition ». Si elle ne faisait plus compétition, elle n’était pas pour autant inactive et a continué de pratiquer tout au long de sa grossesse. Bien qu’ayant arrêté la course à pied à partir du 4e mois, elle a maintenu des sorties à vélo et des randonnées, avant de ne faire que du ski de randonnée lors des 3 derniers mois, des activités qu’elle avait l’habitude de faire en parallèle de la course à pied. Cependant, elle était tout de même plus avertie face à sa pratique : « Plus je me rapprochais du terme et plus j’étais prudente sur les itinéraires, afin d’être sûre de ne pas me mettre en difficulté pour les descentes, mais aussi avoir du réseau téléphonique, au cas où… ».

Pour ce qui en est de la reprise, Marie Dohin a expliqué que « le quotidien est chamboulé et ton enfant te prend tout ton temps, toute ton attention et toute ton énergie, mais en tant que personne active et sportive, je suis très rapidement retournée marcher en montagne, toute seule ou avec ma fille en porte-bébé ». La reprise de la course à pied est revenue après 2 mois que ce soit pour elle, mais aussi pour Fianoa Porte avec « une reprise très progressive et à l’écoute des ressentis » comme elle nous l’a mentionné : « si on est à l’écoute de nos sensations le corps nous dicte par lui-même ce qu’on peut faire ou non ».

Fiona Porte maman traileuse
Fiona Porte maman traileuse

Fiona Porte a utilisé « la méthode de Gasquet que j’ai découverte à ce moment-là et que j’enseigne désormais. C’est un renforcement des muscles profonds avec une approche posturo-respiratoire et surtout un travail de renforcement du périnée » et Marie Dohin a suivi le protocole post-grossesse de la Clinique du Coureur : « Je suis repartie de 0 avec des sorties de 10 minutes avec 20 secondes de course et 40 secondes de marche. Petit à petit tu augmentes, et il m’a fallu 1 mois et demi avant de courir 1 heure non-stop ».

Une fois la reprise passée, il faut alors combiner les 2 pratiques : celle de traileuse et celle de maman. Cependant les 2 sont complémentaires : « ma fille est née peu de temps avant le confinement. Je l’ai pas mal utilisé pour faire du travail de renforcement, ça nous amusait autant l’une que l’autre ! » comme nous l’a témoigné Fiona Porte.

Il ne faut pas oublier que le papa fait également partie de l’équation et qu’il a un rôle clé dans la conjonction sportive de haut niveau/maternité. Comme nous l’a expliqué Marie Dohin : « Le papa qui est bien présent aussi me soutient afin que je puisse continuer de m’entraîner et de travailler. Ce quotidien familial me permet de tout mener de front ».

Traileuse de haut niveau et maternité, oui c’est possible, mais il est vrai que ce nouvel arrivé demande des adaptations. « La clé c’est l’organisation et l’optimisation », une phrase de Marie Dohin qui résume bien la situation.

Nous leur avons également demandé les conseils qu’elles pourraient donner aux futures mamans, et voilà ce qu’elles nous ont répondu :

  • S’écouter et prendre en compte ses ressentis
  • Ne pas vouloir se comparer car toutes les femmes et toutes les grossesses sont différentes
  • Ne pas essayer de nouvelles disciplines
  • Pratiquer à basse ou moyenne intensité, afin de ne pas mettre le bébé en dette d’oxygène (idem pour l’altitude, si on vit en plaine ne pas dépasser les 2500m d’altitude si on va en montagne, et si on vit déjà en altitude rester dans ses zones habituelles)
  • Penser à son périnée même pendant la grossesse, car on peut vraiment gagner un peu de temps sur la reprise si on anticipe dès le dernier trimestre (la méthode de Gasquet par exemple).
  • Ne pas hésiter à consulter : le personnel médical est là pour rassurer, s’assurer que tout se passe bien et aiguiller.

Killian Tanguy

mars, 2024

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